Avec Charles Melman, Patrick Guyomard, Marc Darmon, Pierre-Christophe Cathelineau, Gérard Amiel et Esther Tellermann
Ce sont des mutations économiques, politiques, sociales, induites par le développement technologique, notamment les technologies numériques, de leurs conséquences sur « la nouvelle économie psychique », dont nous nous entretiendrons avec Bernard Stiegler.
Philosophe, directeur de l’institut de recherche du centre Georges Pompidou, créateur et président du groupe Ars Industrialis, Bernard Stiegler, qui a siégé trois ans au Conseil National du numérique, analyse en effet dans ses nombreux ouvrages les rapports entre le capitalisme consumériste désormais dominant, et l’emprise subjective, sous une fluidité apparente, des nouveaux médias. La désinhibition généralisée prônée par les écrans, l’appel à la même jouissance de l’obscène de la pornographie, de la violence, de l’opinion, signeraient-ils une période de « dénéotisation », dominée par l’ubris, le plus-de-jouir du discours capitaliste ?
En effet, l’évolution de la technologie, analyse Bernard Stiegler, celle en particulier des réseaux numériques, contrôlée uniquement par le marché, échappe au contrôle des États et des acteurs de l’éducation, venant faire « disruption » entre sa vitesse et l’intelligibilité collective.
Ainsi les savoirs véhiculés aussi par l’université, les récits collectifs se voient pulvérisés par la gouvernementalité algorithmique, proposant par exemple sur les réseaux sociaux la grégarisation des comportements, produisant un « nous » du ressentiment plus que civisationnel, projetant sur des identifications d’autant plus radicalisées, qu’elles ont perdu toute assise…
Assistons-nous à « une prolétarisation générale » selon l’expression de Bernard Stiegler, pour autant, comme l’énonçait Jacques Lacan, que « le prolétaire est serf, non pas du maître mais de sa jouissance » ?
À quelle normalité comme symptôme les psychanalystes ont-ils désormais affaire ?
Quelle « raison » opposer au nihilisme contemporain ?
Bibliographie sélective
- De la misère symbolique. La catastrophe du sensible, tome 2, Flammarion, 2005 ; rééd. « Champs essais », Flammarion, 2013.
- La Télécratie contre la démocratie. Lettre ouverte aux représentants politiques, Flammarion, 2006 ; rééd. « Champs essais », Flammarion, 2008.
- Ce qui fait que la vie vaut d’être vécue. De la pharmacologie, Flammarion, 2010.
- Dans la disruption. Comment ne pas devenir fou, édit. Les liens qui libèrent, 2016 ; rééd. Babel, Actes Sud, 2018.
TELLERMANN Esther