Déclaration des associations psychanalytiques brésiliennes
Introduction de Gérard Pommier
Oui, l’inconscient, c’est le politique ! C’est tel quel que Lacan l’a énoncé. L’inconscient porte l’histoire. Tout d’un coup, un peuple se révolte, alors que personne ne s’y attend. Élu grâce à un coup d’état judiciaire, Bolsonaro est un nostalgique de la dictature militaire. Les associations Psychanalytiques Brésiliennes viennent de prendre position contre ses derniers coups de force. Dérogent-ils en cela a leurs positions de Psychanalystes ? Ne se sont-ils prononcés qu’à titre de citoyens ? Non, car quelle est la tâche du Psychanalyste, sinon de libérer la parole ? Et la parole est étouffée sous une dictature. Les collègues qui prônent la « neutralité » collaborent en réalité à l’oppression. Freud n’a jamais cessé de prendre des positions politiques. Fidèles à sa leçon, nous nous déclarons solidaires de nos collègues Brésiliens.
MANIFESTE DE CONDAMNATION ET REJET
De la part des associations Appoa, Laço analitico, Maiêutica Florianopolis, Praxis lacaniana
Nous, les Psychanalystes unis pour la démocratie, condamnons les déclarations inhumaines, infâmes et indignes de Jair Bolsonaro. L’actuel président de la République attaque la vérité historique, incite à la haine et à la violence, offense et méprise des citoyens qui se sont battus et se battent toujours pour la démocratie au Brésil.
Et il ne fait pas autrement envers les plus démunis, les femmes, les Noirs, les Autochtones, les LGBTQ+ pour atteindre le comble de l’inacceptable, l’obscène vilipendage de la mémoire d’un militant de l’AP (Action populaire) torturé et assassiné dans les geôles de la dictature militaire.
L’actuel président s’avoue complice de ce crime d’État et se rend en l’occurrence coupable d’un autre crime: l’occultation et l’omission de la vérité historique ( il « sait très bien » comment cette mort a eu lieu), son devoir étant de la rendre publique et de faire punir les criminels au lieu des ’associer à eux. Et voilà que nous apprenons qu’il a destitué le président et trois autres membres de la CSMDP (Commission spéciale sur les morts et disparus politiques) pour y placer ses pions.
Avec les preuves récemment diffusées des illégalités commises pour le faire élire à la fonction suprême de la République et face aux dangers auxquels est exposée notre démocratie avec les menaces aux libertés garanties par la Constitution, il devient clair que Jair Bolsonaro ne mérite pas d’être le président de tous les Brésiliens compte tenu de son biais partisan, de son absence d’engagement avec la vérité, de son manque d’éthique et de sa cruauté.
Ce qui nous humanise est la vérité historique qui nous insère dans une langue, une culture, une classe sociale, une nation, une histoire et une ligne trans-générationnelle entre nos parents et nos enfants ; ce sont les affects et les pulsions dans les liens sociaux, lesquels nous permettent de promouvoir des institutions garantes d’un pacte social de coexistence où l’autre ne peut être réduit à un objet, abusé ou éliminé ; c’est la liberté individuelle de vivre ses propres choix et de manifester ses opinions et leur potentiel de création et de transformation dans la diversité qui fait de chacun un être singulier.